Quelles applications fournissent le plus de données personelles sur leurs usagers
Pourquoi les gens s’inquiètent-ils des applications
de traçage ? On fournit des données encore plus personnelles à des
entreprises privées ! Pourtant…
Source :
L’Actualité
En prévision
de la redoutée deuxième vague d’infections à la COVID, l’Institut québécois
d’intelligence artificielle (Mila) a créé une application de recherche de
contacts qui soulève des craintes. Pourquoi s’inquiéter de donner à COVI la
permission de collecter certaines de nos données personnelles, alors qu’on est
des livres ouverts ou presque sur Facebook ou WhatsApp, par
exemple ?
Pour
répondre à cette question, commençons par comparer les données collectées par
COVI, par ABTraceTogether (l’appli adoptée par l’Alberta), par Facebook et
WhatsApp (deux des applications les plus populaires de la
décennie), par Uber et par Flo, une application « santé »
très téléchargée.
COVI
Voici les
données que COVI peut récolter sur chaque utilisateur, selon
sa foire aux questions :
L’âge, le
sexe, l’état de santé, les symptômes, les comportements, la localisation
géographique approximative, les statistiques de déplacements, l’historique des
rencontres, les données analytiques sur l’utilisation de l’application et le
résultat du test de dépistage s’il s’avère positif.
L’utilisateur
doit donner son consentement pour que les données puissent être transmises au
gouvernement. Elles seront détruites à la fin de la pandémie.
Ces données
ne sont pas anonymisées. « On ne fournit pas de nom, mais ces informations
sont assez uniques pour qu’on puisse vous identifier », explique le
directeur de l’Institut de la cybersécurité et de la vie privée de l’Université
de Waterloo, Florian Kerschbaum.
ABTraceTogether
Voici les
données qu’ABTraceTogether récolte sur chaque
utilisateur, selon son site Internet :
Le numéro de
téléphone, les informations sur le téléphone et les données Bluetooth
(catalogue des contacts à moins de deux mètres d’autres utilisateurs).
ABTraceTogether
est assez différente de COVI, puisqu’elle ne collecte pas de données sur la
santé. Quand une personne est déclarée positive, les autorités albertaines
communiquent avec elle pour faire le suivi de ses contacts et lui demander si
elle utilise l’application. Si oui, elles se serviront des rencontres
enregistrées par ABTraceTogether et préviendront les utilisateurs touchés.
L’utilisateur doit donner son consentement pour que ses données puissent être
transmises au gouvernement. Elles seront détruites à la fin de la pandémie. Les
données sur les contacts avec d’autres sont préservées pendant 21 jours sur le
téléphone.
Facebook
Voici une
liste non exhaustive des données que Facebook peut récolter sur chaque utilisateur, selon
les fonctionnalités utilisées :
Communications,
personnes avec lesquelles vous communiquez le plus, photos, lieu et date de la
prise d’une photo, date de la création d’un fichier, croyances religieuses,
opinions politiques, état de santé, origine ethnique, adhésion à un syndicat,
croyances philosophiques, abonnements aux groupes et aux pages, interactions
avec les groupes et les pages, carnet d’adresses, journal d’appels, textos,
type de contenu consulté, heure, fréquence et durée des activités, manière dont
l’appareil photo est utilisé, informations transactionnelles, numéro de carte
de crédit ou de débit, informations d’authentification de compte, factures,
livraisons, coordonnées, les renseignements que d’autres utilisateurs peuvent
fournir à votre sujet et beaucoup plus.
Des
partenaires de Facebook peuvent lui communiquer des informations à votre sujet,
et ce, « que vous possédiez ou non un compte Facebook ou que vous soyez
connecté ou non à Facebook », précise la plateforme.
WhatsApp
Voici une
liste non exhaustive des données que WhatsApp peut récolter sur chaque
utilisateur :
Numéro de
téléphone, informations de facturation, informations sur votre téléphone
cellulaire, carnet d’adresses, témoins, groupes et listes de diffusion, manière
dont les services sont utilisés, localisation de l’appareil et statuts (en
ligne, hors ligne, etc.).
L’application
collecte aussi les données que des fournisseurs tiers et d’autres utilisateurs
peuvent partager à votre sujet.
Voici une
liste non exhaustive des données que Flo, une application de suivi de cycle
menstruel, recueille sur chaque utilisateur, selon
les fonctionnalités utilisées :
Nom complet,
adresse courriel, date de naissance, lieu de résidence, informations sur la localisation,
carte d’identité, poids, température corporelle, dates du cycle menstruel,
symptômes liés au cycle menstruel, activités sexuelles, informations liées à la
vie personnelle, adresse IP, fuseau horaire, informations sur l’appareil,
habitudes d’utilisation.
Uber
Voici une
liste non exhaustive que l’application de transport Uber recueille sur chaque
passager :
Nom,
courriel, numéro de téléphone, mot de passe, adresse résidentielle, photo du
profil, informations de facturation, pièces d’identité, données démographiques,
notes données aux chauffeurs, compliments donnés aux chauffeurs, données de
localisation, données de transactions, informations sur l’utilisation de
l’application, informations sur le téléphone, adresse IP, communications entre
les passagers, les livreurs ou les chauffeurs.
Uber peut
aussi collecter des données provenant d’autres sources, notamment de
« sources disponibles publiquement » et de fournisseurs de services
de marketing.
***
En voyant les listes côte à côte, on se rend vite
compte que nos données, même les plus personnelles, sont récoltées en masse par
les entreprises privées. Et elles se promènent un peu partout.
Mais on ne
peut pas les comparer, explique la consultante en communication numérique et en
nouvelles technologies Nellie Brière, puisque les récoltes de données ne
servent pas les mêmes buts. « Je vois une énorme différence entre une
application dont les données sont transmises au gouvernement et une application
mobile d’une entreprise privée qui les collecte dans le but d’offrir un service
en retour », fait-elle valoir.
Même son de
cloche du côté de Luc Lefebvre, cofondateur de l’organisme spécialisé en
questions de sécurité publique Crypto.Québec.
« Les
données du traçage des contacts sont envoyées à des gouvernements et le but est
de contrôler ce qui se passe dans la population. »
Contrairement
à ce qui passe avec une application comme Facebook, dont les données sont
envoyées à une entreprise privée et dont le but avoué est la recherche de
profits, dit-il.
« Même
s’il y a des abus potentiels (et réels) dans les deux cas, [ceux qui pourraient
découler d’une application de suivi] seraient plus dangereux. »
Les sociétés
privées ne sont pas au-dessus de la critique pour autant, note Luc Lefebvre.
« En sécurité de l’information, le ciel est en feu.
Les fuites
de données personnelles sont quotidiennes et les scandales et les abus
aussi », dit-il, en ajoutant que le Canada et le Québec devraient profiter
de la situation pour moderniser les lois entourant la capture de données et de
métadonnées.
Dans les dernières années, Facebook et son utilisation des données personnelles de 87 millions de
personnes se sont retrouvées au centre d’un scandale
technopolitique. WhatsApp a connu au moins une brèche de sécurité
majeure. Uber a annoncé que des pirates avaient volé les informations de 57 millions
d’utilisateurs. Et l’application Flo s’est retrouvée dans
l’eau chaude après avoir transmis des données d’utilisateurs à
Facebook.
Connaissez-vous le paradoxe de la vie privée ?
Le paradoxe
de la vie privée décrit la tendance des internautes à s’inquiéter de leur vie
privée et de la sécurité de leurs données, tout en s’exposant de plus en plus à
des failles et à des processus opaques.
« Si
j’ai à cœur ma vie privée, je veux qu’elle soit protégée », dit le
directeur de l’Institut de la cybersécurité et de la vie privée de l’Université
de Waterloo, Florian Kerschbaum.
« Mais
si on m’offre un tout petit bénéfice, quelque chose en retour, je suis prêt à y
renoncer. Ce paradoxe, il profite à Google et à Facebook .»
Mais pas aux applications de traçage, soutient-il.
« Le bénéficiaire de l’application, ce n’est pas son utilisateur à
proprement parler. Ce sont les autres utilisateurs qu’il aide ou les agences de
santé publique à qui il transmet les informations. »
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