Pourquoi le gouvernement Canadien a effacé un prêt de
plus de 2 milliards de dollars a Chrysler?
Source : Gérald Fillion, Radio-Canada
Il y a près de
10 ans, les gouvernements des États-Unis, du Canada et de l'Ontario
venaient à la rescousse de GM et de Chrysler, en pleine crise financière, une
aide de plusieurs dizaines de milliards de dollars pour éviter la perte de
centaines de milliers d'emplois.
Aujourd'hui, le
gouvernement du Canada efface, en catimini, une créance de 2,6 milliards
de dollars, de l'argent que Chrysler n'a finalement jamais remboursé au Trésor
public.
Les gouvernements du Canada et de l’Ontario ont injecté environ
3 milliards de dollars canadiens dans les activités de Chrysler et près de
11 milliards dans GM.
Ces sommes s’ajoutaient aux investissements américains dépassant les
50 milliards de dollars.
Les gouvernements ont aussi acheté des actions de GM, des actions qui
ont été vendues depuis.
Les deux entreprises ont également remboursé certaines sommes.
Mais le gouvernement du Canada a prêté 1,25 milliard de dollars à
Chrysler en pleine tempête, alors que l’entreprise tentait de survivre.
Chrysler a finalement déclaré faillite à la fin avril 2009, avant de
renaître sous un nouveau nom dans une entente conclue avec l’italienne Fiat.
Le prêt n’a jamais été remboursé, les intérêts se sont accumulés pour
atteindre un total de 2,6 milliards de dollars dans les livres du fédéral.
Sans le dire à personne, Ottawa a décidé, dans ses comptes publics de
2018, publiés vendredi dernier, de rayer, d’effacer, de radier le montant que
Chrysler lui devait.
Comment en
sommes-nous arrivés là?
La réponse est dans le rapport du vérificateur général de l’automne
2014. « Selon une des conditions initiales de l'aide financière fédérale,
est-il écrit dans le rapport, chaque société devait produire un plan de
restructuration acceptable.
Or, nous avons constaté qu'Industrie Canada n'avait pas demandé à
Chrysler ni à GM de lui fournir des plans définitifs de restructuration de
leurs activités au Canada. »
Autrement dit, le gouvernement du Canada ne s’est pas assuré de faire un
suivi serré de son soutien à Chrysler.
Aujourd’hui, Ottawa affirme que ces sommes sont irrécupérables alors que
le gouvernement dit avoir tout fait pour tenter de mettre la main sur cet
argent.
La vieille Chrysler a fait faillite et la nouvelle entité, qui fait des
milliards de dollars de profits par année, n’est pas tenue de rembourser ces
sommes.
On pourrait jouer le même film prochainement parce qu’un prêt à GM de
plus d’un milliard de dollars est toujours en souffrance.
Ce prêt a été réalisé le 29 avril 2009 et n’a pas été remboursé,
bien que l’entreprise se soit entièrement restructurée.
En 2008, les crises se multiplient : crise hypothécaire, crise
financière, crise du monde bancaire.
Dans le secteur de l’automobile, les marchés chutent, les pertes
d’emplois se comptent en millions. Le gouvernement Bush, puis celui de Barack
Obama ainsi que la Réserve fédérale vont injecter des milliers de milliards de
dollars dans l’économie pour tenter de colmater les brèches, freiner la chute
et relancer l’économie.
C’est dans ce contexte, sans précédent depuis la crise des
années 30, que les gouvernements interviennent pour sauver de la noyade
les fabricants d’autos et leurs millions d’employés et de retraités.
Les gouvernements du Canada et de l’Ontario, sous la pression des
États-Unis, acceptent de venir en aide à GM et à Chrysler.
L’intervention doit se faire rapidement, ce que font les autorités au
Canada. En même temps, les grands de l’automobile sont en demande, ils
réclament cet argent, ils ont besoin de ces capitaux.
Si l'on peut imaginer que les choses se sont déroulées à toute vitesse,
des questions légitimes et essentielles se posent sur ce qui s'est passé.
Il y a là un manque de transparence, comme le soulignait le vérificateur
général en 2014, un véritable problème de reddition de compte.
« Le ministère disposait aussi d’analyses limitées, écrit le
vérificateur, sur la façon dont les mesures de restructuration devaient
améliorer la situation financière des filiales canadiennes, sur les concessions
faites par les parties prenantes et sur la façon dont les sociétés comptaient
rembourser les prêts. »
Le vérificateur affirme qu’Industrie Canada « n’a pas demandé aux
sociétés de soumettre des rapports portant expressément sur leur utilisation
des fonds » et que le ministère « possédait peu d’informations sur
l’utilisation réelle d’un prêt de 2,8 milliards de dollars accordé par le
gouvernement à GM Canada ».
Il écrit que, « faute d’informations détaillées sur l’utilisation
des fonds, Industrie Canada ne sait pas dans quelle mesure l’aide financière
fédérale a contribué à la vitalité de Chrysler Canada et de GM Canada ».
Le résultat aujourd'hui apparaît au grand jour : si les
gouvernements du Canada et de l'Ontario ont permis le maintien d'une forte
industrie de l'automobile au pays, ce qui était l'objectif premier, l'opération
a tout de même coûté cher aux contribuables canadiens.
La moindre des choses serait de le leur dire clairement.
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